-
vases communicants (9)
«(...) pourquoi ne pas imaginer, le 1er vendredi de chaque mois, une sorte d’échange généralisé, chacun écrivant chez un autre-? Suis sûr qu’on y découvrirait des nouveaux sites (...)». François Bon et Scriptopolis ont lancé l’idée des Vases Communicants.
Pour ma neuvième participation aux Vases Communicants, je suis heureuse et très honorée d'accueillir Danielle Carlès, traductrice d'Horace et qui se définit elle-même comme artisan des Lettres dans son échoppe, Fonsbandusiae... Elle écrit aussi en son propre nom et a accepté mon invitation à rebondir sur des phrases de mes textes. J'en ai fait autant et vous trouverez ici mes essais.
#1 Ils allaient mourir et pour gagner du temps on avait creusé les trous, préparé les tombes au cimetière, invité les proches et les amis
Ils allaient lourdement lourdement l’idée de
mourir pesait derrière les yeux marche plomb
et pierre marche à l’horizon du pas pour une
pour un pour rien pour ça allaient de ce pas
gagner on ne sait quoi l’idée de rêver venue
du passé pesait derrière les yeux c’était le
temps sur eux lourdement lourdement ailleurs
on avait dit ils allaient de l’avant mais on
avait perdu tout ailleurs tout ici gratté et
creusé la trace des ornières soulevé emporté
les amas de poussière buté trébuché dans les
trous ils allaient où ils allaient qui était
préparé à arriver pèsent pèsent sur les yeux
les vieux enfermements du cœur et pierres et
tombes ils allaient sans avancer se savaient
au moment de rien portant avec eux un intime
cimetière de rêves défunts le bonheur jamais
invité ni goûté le regard jamais tourné vers
les proches dans l’attrait commun de la peur
et de l’amertume ils allaient ils comptaient
les amis enterrés et ils restaient entre eux
#2 Il parade sous un grand parasol décoloré par le soleil un perroquet sur l'épaule
Il n’y a pas un jour rue de l’Opéra où tête haute à la
parade sourire aux lèvres fierté palpable et serviette
sous le bras il ne se dirige vers la plage droit comme
un i comme il se dit l’œil intérieur toujours vers lui
grand ouvert visage à peau plissée il n’a jamais vu le
parasol et celui qui reste cloué sur un point un point
décoloré sur l’horizon plat mer aiguë comme un couteau
par delà la plage grise mais lui nage buvant le sel et
le cœur presque arrêté nage aveugle brave l’absence de
soleil exulte corps glacé feu dans la moelle des os et
un jour de plus un jour de plus ne voit pas n’a pas vu
perroquet sur l’épaule celui qui s’est tourné ailleurs
sur la plage avec son parasol inutile et serviette sur
l’épaule il remonte seul à la parade la rue de l’Opéra
#3 Je voudrais que le temps passe par la porte de derrière
Je voudrais dans mon silence
que s’entende ce que j’ai tu
le poids du vide l’âpreté du
temps de la nuit du cœur que
passe le bruit arrêté le cri
par espérance rompue c’était
la violente vie qui ferme la
porte goutte sous la brûlure
de cette eau je sais le goût
derrière le feu l’eau de vie
#4 ballon rouge lancé par un enfant apprenant à jouer
ballon vers le soleil retombé
rouge là-bas
lancé bulle de lait aux lèvres
par un joyeux matin de printemps
un beau matin de gloire par un
enfant juste né à parler juste
apprenant juste venu à ma vie
à mes deux bras
jouer un temps de légèreté
#5 Dire le rebond, bondir de nouveau, de nouveaux bonds entre chaque virgule, les dire et ne s'arrêter qu'à bout de souffle
Dire dérobé enrobé de charme
le redire en flots de larmes
rebond de soi sur note aiguë
bondir à vrai oui à bon dire
de soi à distance et vers le
nouveau chemin de soi bondir
de peur voilà les battements
nouveaux à l’endroit du cœur
bonds en dehors de soi perdu
entre les flammes d’hier sur
chaque moment de joie chaque
virgule respiration du récit
les bonds dans les blancs du
dire les espaces où rebondir
et oublier la raideur passée
ne pas s’oublier mais ne pas
s’arrêter croire qu’il n’y a
qu’à la fin ce rien perdu au
bout du bout sans une miette
de vie solide bondir dans un
souffle tout embué de larmes
Pour retrouver et lire les autres rendez-vous des Vases Communicants du mois d'août, encore une fois patiemment et généreusement listés par Brigitte Célérier, marathonienne passionnée et passionnante du festival d'Avignon, cliquez ici.
-
Commentaires
2D3Vendredi 3 Août 2012 à 16:28Echangez ! echangez! Et tres longue vie a vous deux !
Chance d'avoir des scribes inspiré(es) pour débusquer ,nommer ,les états d'ame en écho !
3Danielle CarlèsVendredi 3 Août 2012 à 19:58Christine, au soir de cette belle journée de lectures, de moi à toi, merci et n'arrêtons pas !
Ajouter un commentaire
Un grand merci encore Danielle pour ces textes que tu poses ici... J'espère que notre échange ne s'arrêtera pas là.